Entretien avec Olivier Collin, directeur du Théâtre Beaulieu à Nantes

Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?

Mon parcours est simple. A un moment, j’ai eu envie de faire du théâtre, j’ai créé ma petite troupe : la compagnie « Même pas cap ! ».

Un jour j’ai eu l’opportunité de louer un théâtre car je me rendais compte que sans lieu, cela devenait difficile de pouvoir fidéliser le public. En 2009, nous nous sommes ainsi installés au Sémaphore, une salle Nantaise de 278 places.

Il fallait identifier cette salle inconnue des nantais et située sur l’ile de Nantes dans le quartier Beaulieu. Pascal Maillard, metteur en scène fourmillant d’idées très simples m’a soufflé le nom de « Théâtre Beaulieu ». Comme c’était gratuit j’ai dit oui. [Rires]

Puis nous avons créé la marque : « Théâtre Beaulieu » en référence au quartier éponyme. Comme nous n’étions pas connus, ce nom permettait d’associer et d’identifier le lieu à son emplacement géographique.

A l’intérieur du Théâtre Beaulieu 

La Cie Même pas Cap a essuyé les plâtres de la belle aventure qui démarrait avec Toc Toc de Laurent Baffie. Cette pièce est une pépite d’humour, mais ce sont des acteurs tel que Michel Roux, Jacqueline Maillan, Maria Pacôme, Jean le poulain, Jacques Balutin ou encore Jean Poiret ou Michel Serrault … qui me faisaient rire quand j’étais petit et qui m’ont donné envie de faire pareil.

Quelle est la ligne artistique du Théâtre Beaulieu ?

Le projet initial était de remonter des pièces qui ont fait les beaux jours d’« Au théâtre ce soir » ou des grands succès  théâtre de boulevard comme « Le vison voyageur », « Oscar », « Potiche », «  Le noir te vas si bien »... en leur donnant un petit coup de lifting.

Les spectateurs aiment voir un spectacle « sûr ». Nous n’avons pas de tête d’affiche donc la star, c’est le titre !

Je programme des pièces qui ont fait leurs preuves dans une époque lointaine avec un humour qui a changé. Il faut donc les monter avec regard qui colle à notre époque. Les mœurs ont évolué, l’humour aussi, les amants dans le placard font toujours recettes mais pas que !

Nous voulons dépoussiérer les pièces cultes. La ligne artistique du Théâtre Beaulieu c’est d’être un théâtre comique : un théâtre qui donne plaisir à s’amuser ensemble.

Le public joue aussi un rôle, il est là pour donner la réplique à travers ses rires et le partage de ses émotions. Nous voulons que les spectateurs du théâtre Beaulieu repartent contents de leur soirée.

Aujourd’hui, des pièces comme « Panique en coulisses » de Michael Frayn, « Thé à la menthe ou t’es citron » de Patrick Haudecoeur, ou encore les pièces « catastrophes » ont leur place au Théâtre Beaulieu.

En quoi le Théâtre Beaulieu se différencie des autres théâtres nantais ?

Le Théâtre Beaulieu possède un grand plateau qui permet d’avoir jusqu’à 9 comédiens sur scène.

Nous avons des décors de grande taille, de beaux costumes. Et nous avons parfois des partenariats avec l’opéra.

Avant le premier confinement, nous jouions « Les ténors » de Ken Ludwing ; c'est Nantes-Angers-Opéra qui a mis à la disposition de cette pièce « Tony Awardisée » une douzaine de couturières et couturiers pour fabriquer les costumes des 8 comédiens :  

®021prod - Les tenors

Il en est de même pour la comédie musicale « Les chansons préférées de l’Oncle Walt » :

Notre capacité d’investir avec des moyens importants nous permet de proposer des spectacles de grande envergure qui resteront longtemps à l’affiche avec des séries continues de 60 à 80 représentations.

Quand une pièce est jouée pendant 6 mois, il faut absolument qu’elle fonctionne et c’est un challenge intéressant. J’aime ce modèle parisien qui accorde du temps à un spectacle pour s’installer et créer son bouche à oreille. Le Théâtre Beaulieu est un théâtre 100% producteur.

Les vendredi, samedi et dimanche nous jouons nos spectacles dans la salle du Sémaphore mais et dès septembre 2022, nous jouerons au nouveau Théâtre Beaulieu…  

Qui est votre public ? D'où vient-il, quels sont ses goûts ?

Le Théâtre Beaulieu est situé du côté Sud Loire, et nos spectateurs viennent ainsi de Vendée et du centre-ville. Notre zone de chalandise s’étend sur un rayon de 30 à 40 km.

Nous accueillons maintenant de plus en plus de familles. Les parents accompagnent leurs enfants aux spectacles jeune public, et reprennent avec eux le goût du théâtre qu'ils avaient un peu perdu de vue.

Le dimanche, un public plus âgé vient aussi retrouver le plaisir du théâtre. Des pièces comme « Oscar », « Le noir te va si bien » ou encore « Potiche » qui ont marqué les années 60 ont vraiment la cote auprès des plus de 75 ans.

Petite anecdote : il n’est pas rare d’entendre des spectateurs de près de 80 ans nous confier « c’est la première fois qu’on vient au théâtre ! ». Et ça c’est vraiment formidable !

Je fais ce métier pour le partage et quand on parvient à amener des familles au théâtre, c’est gagné.

Racontez- nous le projet du nouveau théâtre Beaulieu en construction, que vous ouvrirez courant 2022… Continuerez-vous sur la même ligne artistique ?

Le nouveau Théâtre Beaulieu ouvrira le 15 septembre 2022. Le chantier avance bien et les espaces intérieurs du bâtiment sont en train d'être construits. Grande nouveauté : dès l’ouverture, le public pourra découvrir nos spectacles la semaine en plus du week-end ! 

Le « nouveau »  théâtre Beaulieu 

Nous ouvrirons le théâtre avec « Sauve qui peut », une adaptation de  « Run for your life » (Stationnement alterné) de Ray Cooney,  mise en scène par Didier Caron. Il y aura une soirée d’inauguration très simple, à l’image de notre état d’esprit, avec une première partie qui rassemblera tous les gens qui ont participé à sa construction : maçons, électriciens, etc…

Je souhaite continuer à proposer du divertissement, surtout le week-end, mais j’aimerais aussi programmer des pièces policières avec moins de comédiens sur le plateau, et des intrigues à suspens. 

Nous reprendrons des spectacles musicaux comme « Les chansons préférées de l’Oncle Walt », une comédie musicale que j’ai écrite durant la pandémie et dans laquelle on peut me voir jouer et chanter.

Vous êtes vous-même acteur et créateur de spectacles, comment s’articulent vos différentes activités ?

Je suis un grand amateur de dessins animés et notamment de Disney. Musicalement, il se passe toujours des choses extraordinaires, si bien que les chansons des films Disney traversent les décennies. J’avais envie de monter un spectacle qui reprenne ces chansons avec un fil conducteur pour trouver la meilleure manière d’intéresser le public.

Ainsi, pour créer « Les chansons préférées de l’Oncle Walt » je me suis entouré de deux chanteuses-comédiennes et de trois musiciens tous professeurs au conservatoire. L’Opéra de Nantes a fait les costumes, un décor vidéo et j’ai imaginé un spectacle pour enfants mais avec une histoire qui parle aussi aux adultes. C’est un spectacle qui transmet du bonheur, de la couleur et qui swingue.

Je suis également comédien et je viens de finir « Le Bourbier » de Frédéric Bouchet. Il y a une très bonne entente entre nous. Nous nous sommes retrouvés sur les mêmes valeurs du théâtre de divertissement. Frédéric écrit des comédies très efficaces qui manient parfaitement les ressorts du boulevard et le public ne résiste pas.

« Le Bourbier » de Frédéric Bouchet

Notre nouveau spectacle «  A deux lits du délit » vient de commencer.  Mise en scène par Pascal Maillard, avec Violaine Gallard, Aurélia Demay, Florent Longépé et moi-même, cette pièce est décidément très efficace !  

Le mot de la fin : que souhaitez-vous dire aux spectateurs ?

Chers amis spectateurs, pendant ces 1 an et demi de pandémie, nous vous avons entendu nous dire qu’il n’y avait plus de culture, et que cela vous manquait. Pourtant, quand nous avons rouvert les théâtres les spectateurs étaient peu nombreux. Vous avez certainement changé vos habitudes mais quittez vos chaussons, mettez des baskets et revenez au théâtre ! Vous vous rappellerez comme c’est bon !