LES DEUX BRIDGES DE LA SAGESSE
La mère morte et réduite en poudre, les voilà parties, munies d'une liberté nouvelle et encombrante, à la recherche, croient-elles, de la tombe du père, enterré, pensent-elles, quelque part vers le nord.
Donc, en avant toute pour Annette et Bernadette, (Doublepatte et Patachon, Serviette et Ponge, Didi et Gogo) les deux sSurs qui ont passé le temps de jouer à la marelle, qui sont deux mais n'en font qu'une, même si l'une ose et l'autre prend, et qui ne manquent pas d'air malgré les crises d'asthme.
Dans le coffre à jouets qui leur sert de malle aux souvenirs, elles piochent de quoi équiper leur épopée : autocar de soixante places, sandwiches au thon, thermos de thé, carte routière et boîte à biscuits.
De cimetière en vieux dancing ; de petit coup de bière en petit coup de main, en train, à pied ou en voiture, elles taillent la route en chantant pour se donner du courage.
L'important, n'est-ce pas, n'est pas d'arriver, ni même de partir, c'est le voyage, c'est de s'offrir une petite cigarette bien méritée, c'est de mordre la vie à belles dents (belles, n'exagérons rien, il y a deux bridges dans le tas, à cet âge on fait avec ce qu'on a).
A belles dents ? Dents de sagesse ou dents de folie ?
Patrice Kerbrat