Sur le plateau, un décor naturaliste et feutré accueille la scène d’exposition. Nous comprenons vite que ce spectacle s’ouvre par la fin. Comme dans les meilleurs scénarios cinématographiques, nous plongeons dans un fantastique flashback théâtral pour découvrir la vie du fascinant Glenn Gould.
Après son succès à Avignon et au Théâtre du Petit Montparnasse, nous avons enfin découvert la pièce d’Ivan Calbérac au Théâtre du Splendid.
Un biopic oedipien
Au commencement il y a la mère, semble rapidement nous indiquer le spectacle d’Ivan Calberac. Depuis le corridor nous parvient la voix du jeune Glenn (Thomas Gendronneau) qui s’amuse à deviner les notes que lui joue Florence Gould (Josiane Stoleru) sur le piano familial. Il ne pourra la rejoindre qu’à condition de ne pas se tromper.
Heureusement pour lui, le petit prodige a l’oreille absolue et ce rite qui le lie à sa mère devient constitutif de leur relation. Une fusion mère-fils par la musique, présentée dans la pièce comme un rapport oedipien complexe.
C’est d’ailleurs ce qui a particulièrement intéressé Ivan Calberac dans l’écriture de ce biopic :
❝ Dans le destin de ce prodige, ce qui m’a le plus marqué, c’est son rapport à sa mère, une mère étouffante, fusionnelle et probablement incestueuse que Glenn n’a jamais réussi à tuer symboliquement, et qui semble l’avoir traumatisé au point de ne jamais avoir été capable de vivre de relation amoureuse stable… ❞
Une autre femme semble avoir marqué la vie du jeune prodige, il s’agit de sa cousine Jessie, jouée par Lison Pennec. Celle-ci joue à la fois le rôle de confidente et d’amie proche. Elle révèle la nature profonde de Glenn ainsi que la toxicité du lien qui l’unit à sa mère. Leurs rencontres ponctuent le fulgurant parcours du pianiste à chaque étape de sa carrière .
Un texte de théâtre construit comme un scénario
Le texte de la pièce est écrit comme un scénario de cinéma, parfaitement ficelé et captivant. Il suit le parcours de Glenn depuis son enfance jusqu'à sa consécration en tant que star de la musique classique. Il y aborde des thèmes profonds tels que l’exigence, la quête idéale de l’artiste ou encore la vie intime.
Au cœur de ces questions, celle du rôle de l’artiste dans l’interprétation d’une œuvre. Glenn Gould s’interrogeait sans cesse sur la nécessité d’apporter une lecture nouvelle aux œuvres qu’il interprétait.
En miroir, Ivan Calberac reprend cette question à son compte :
❝ Cette interrogation sur le rôle de l’artiste me semble plus actuelle que jamais, et tout spécialement au théâtre. Que pouvons-nous apporter de vraiment vivant au public ? ❞
Composer son personnage comme une partition
Au service du texte, les excellents comédiens de la pièce composent leurs personnages afin de donner vie aux caractéristiques saillantes de ces individus qui ont peuplé la vie du pianiste.
Le comédien Thomas Gendronneau qui interprète Glenn fait preuve d’une remarquable capacité à se fondre dans la peau de ce personnage complexe, à la fois génial et inadapté, au corps ballant et contraint. L’acteur joue du piano mais imite également à la perfection la course des doigts sur un piano imaginaire lors des enregistrements de Glenn Gould qui rythment la pièce.
Une mise en scène enlevée servie par une scénographie esthétique
Enfin, la mise en scène et les effets visuels de la pièce servent efficacement le rythme du récit.
Le décor reste le même et pourtant, à l’aide d’un écran derrière une fenêtre, l’espace est sans cesse recomposé pour nous faire voyager à travers les différents univers de la vie de Glenn Gould. Nous sommes d’abord dans la maison des Gould, traversons un conservatoire, ou encore un studio d’enregistrement…
La création lumière accentue l’esthétisme de la scénographie, donnant parfois lieu à des images proches des œuvres du peintre Edward Hopper, une référence du metteur en scène.
❝ La nouvelle création d’Ivan Calbérac est à la fois exigeante et populaire, poignante et burlesque (…) Une pépite théâtrale et musicale ! ❞ LA PROVENCE
TTT ❝ Ce spectacle habile, qui associe matériau biographique et enjeu artistique, attrape le spectateur par les sentiments. ❞ TÉLÉRAMA
Infos et réservations
A voir jusqu’au 30 avril au théâtre du Splendid
Guichet : 48, rue du Faubourg Saint Martin 75010 Paris
Tél. location : 01.42.08.21.93
Pour réserver des places ou laisser un avis sur notre site, c’est par ici ➔