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[ENTRETIEN] Nathalie LUCAS & Serge PAUMIER, co-directeurs du Théâtre des Gémeaux Parisiens : un duo au service du théâtre vivant

Interview

Dans le 20e arrondissement de Paris, rencontre avec deux passionnés de théâtre aux parcours singuliers et complémentaires. Elle est comédienne, lui est passé par l’enseignement et la production. Ensemble, après avoir fondé le Théâtre des Gémeaux à Avignon en 2019, ils ont ouvert en 2024 le Théâtre des Gémeaux Parisiens, un lieu à leur image : exigeant, ouvert et profondément humain.

Nathalie LUCAS  a étudié à l’école Claude Mathieu à Paris et au Conservatoire d'Orléans, avant de jouer dans plusieurs compagnies, aussi bien en théâtre classique que contemporain.

 

Serge PAUMIER,  a été professeur de français pendant 15 ans. Il crée un club de théâtre avec ses élèves, fonde un  théâtre à Créteil, et y accueille notamment Véronique VELLA, future vice-doyenne de la Comédie-Française. Après une parenthèse loin de Paris, il revient au théâtre en tant que producteur.

 

Leur rencontre a eu lieu il y a une dizaine d’années sur une production de Serge « Les hommes », où Nathalie rejoint la distribution. Leur collaboration débute ainsi, entre confiance artistique et complémentarité humaine. Ensemble ils ont ouvert en septembre 2024, le Théâtre des Gémeaux Parisiens.

Vous avez commencé avec les Gémeaux Avignon : pourquoi avoir voulu créer un lieu à Paris ?

Nathalie Lucas : Nous avons toujours pensé que c’était complémentaire. Mais en réalité, c’est surtout une question d’occasion. Éric LAUGERIAS nous a parlé de ce lieu (l’historique théâtre de Ménilmontant fermé en 2018).

 

Comme on avait déjà l’expérience du Théâtre des Gémeaux à Avignon, on s’est dit : pourquoi pas ? Ce sont deux activités totalement différentes. À Avignon, c’est un festival avec des amoureux du théâtre. À Paris, il faut construire une fidélité sur le long terme.

 

De nombreuses compagnies sont souvent éclipsées par les noms connus et ne peuvent pas immédiatement remplir une grande salle.

 

Notre salle de 300 places permet de les mettre en lumière tout en atteignant un équilibre économique. Et aussi de toucher un public assez large, qui vient de notre arrondissement, mais aussi au-delà. Certains viennent de province, et nous connaissant via le théâtre des Gémeaux d’Avignon au Festival Off d’Avignon.

 

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’ouvrir un théâtre ensemble, donc initialement à Avignon ?

Nathalie Lucas : Serge m’a d’abord parlé de l’idée d’ouvrir un théâtre à Paris, je ne voulais absolument pas d’un lieu ici, trop saturé, trop compliqué. En revanche, ouvrir un théâtre à Avignon me semblait une belle opportunité.

 

On envisageait une petite salle d’environ 150 places. Et puis le hasard d’une proposition immobilière nous a fait découvrir un lieu atypique : plusieurs magasins à réhabiliter. Il a fallu casser des étages intermédiaires pour obtenir la hauteur nécessaire, mais le potentiel était là et on a ouvert le Théâtre des Gémeaux – Avignon en juillet 2019.

 

Ouvrir un théâtre, c’est un engagement de tous les instants, c’est un poids mental et logistique important.

 

« C’est aussi une immense joie de pouvoir offrir un espace vivant, accessible et permanent aux artistes et au public. »

 

Comment définiriez-vous la ligne artistique des Gémeaux ?

Serge Paumier : Éclectique. C’est vraiment le mot.

 

Nous aimons aussi proposer des mises en scène très différentes les unes des autres. Et quand cela est possible, nous essayons de maintenir un certain équilibre, notamment entre metteurs en scène hommes et femmes.

 

« Nous cherchons toujours à ce qu’il y ait une vraie qualité de jeu, bien sûr, une exigence scénographique, et surtout une histoire qui raconte quelque chose, un avec un vrai sujet à défendre. »

 

Dans le 20e arrondissement, on se doit d’être très attentifs à la diversité des propositions. Nous sommes dans un quartier populaire, vivant, où il est important de proposer une offre qui soit à la fois exigeante et ouverte, avec un mélange de classiques, de contemporains et de théâtre musical.

 

Quel message aimeriez-vous que les spectateurs emportent avec eux après une représentation ?

Serge Paumier : Il est important que le spectateur soit transporté, qu’il ressente quelque chose de fort. Je repense au spectacle « Les frottements du cœur » (programmé lors du Festival du Seul.e en Scène en mai 2025) où la salle s’est levée d’un même élan à la fin de la représentation ; un vrai moment d’émotion partagée.

 

« En somme, nous souhaitons que notre théâtre soit un lieu vivant, où les émotions se rencontrent, où chaque spectacle apporte son univers et son message. Un lieu qui invite à la curiosité et à la fidélité. »

 

Que diriez-vous à quelqu’un qui n’a jamais osé franchir la porte d’un théâtre ?

Serge Paumier : Je pense à Jean-Philippe DAGUERRE, qui à 20 ans n’était jamais entré dans un théâtre, comme il l’a raconté aux Molières.

 

Pour moi, ce souvenir est très touchant, parce que quand j’étais enfant, mes parents n’avaient pas les moyens d’aller au théâtre. Le théâtre, je le découvrais surtout à la télévision, avec Au théâtre ce soir, en noir et blanc.

 

Alors, quand on reçoit quelqu’un qui vient pour la première fois, simplement pour partager un moment autour d’un sujet, d’un thème, parce que le théâtre peut parler de tout, d’une multitude de sujets, c’est toujours une joie immense.

 

« Le théâtre est là pour ça : ouvrir les portes, raconter des histoires qui parlent à chacun, et inviter à découvrir cet univers unique. »

 

Quel est votre plus beau souvenir de théâtre ?

Serge Paumier : Pour moi, c’est sans doute « Le Roi se meurt » de IONESCO avec Michel BOUQUET. C’est une pièce que j’ai vue plusieurs fois, d’abord dans les années 90, puis au début des années 2000, et encore en 2014-2015.

 

Il est fascinant de voir comment Michel BOUQUET a évolué dans ce rôle, apportant à chaque fois une nuance différente. Il a même remporté un Molière du meilleur comédien pour cette interprétation. C’est un souvenir très fort, et je suis très heureux que « Le Roi se meurt » soit programmée cette année au Théâtre des Gémeaux à Avignon, dans une mise en scène par Christophe LIDON.

 

Nathalie Lucas : Pour moi, c’est plus compliqué de choisir un seul souvenir. J’ai eu tellement de coups de cœur !

 

Mais je peux citer la compagnie Dos à Deux, une troupe sud-américaine que j’ai découverte à Avignon. Leur travail m’a vraiment touchée. J’ai plein d’autres souvenirs marquants, mais je n’arriverais pas à en isoler un seul. Le théâtre, c’est tout un univers de moments forts.

 

 

Merci à Nathalie Lucas et Serge Paumier qui nous ont accordé leur temps et accueillis dans leur théâtre le 12 mai dernier.

 

 

Théâtre des Gémeaux Parisiens

15 Rue du Retrait – 7020 Paris

theatredesgemeauxparisiens.com

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