Vendredi dernier, nous avons eu le plaisir d’assister à la Générale de Presse de JACQUES DE BASCHER au Théâtre de la Contrescarpe.
La pièce a été conçue par Gabriel Marc qui interprète magistralement le rôle de Jacques De Bascher, dandy – à la...
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Vendredi dernier, nous avons eu le plaisir d’assister à la Générale de Presse de JACQUES DE BASCHER au Théâtre de la Contrescarpe.
La pièce a été conçue par Gabriel Marc qui interprète magistralement le rôle de Jacques De Bascher, dandy – à la réputation sulfureuse – des années 70/80.
Le Pitch :
1984, Jacques De Bascher, le prince des nuits parisiennes, apprend qu’il est positif au VIH. Paris lui tourne le dos, il se retrouve seul dans son appartement.
Il redécouvre ses enregistrements qu’il a faits tout au long de sa vie à l’aide de son magnétophone. Cet appartement, qui a connu de grandes soirées, devient un antre plein de souvenirs, de ses petites réussites mondaines à ses grandes défaites personnelles.
Durant cette soirée, Jacques de Bascher enregistre une dernière cassette pour son compagnon Karl Lagerfeld.
Notre avis : Une pièce à ne pas manquer !
Que ce soit pour l’immersion dans ces années 70/80 où régnaient plaisir et insouciance jusqu’à l’arrivée de cette épouvantable épidémie.
Ou pour le décor d’Erwan Rio qui campe dans les moindres détails l’appartement de Jacques De Bascher
Ou encore pour la mise en scène de Guila Braoudé qui ne laisse à aucun moment place à l’ennui
mais allez-y surtout …
pour le jeu de scène de Gabriel Marc, comédien/auteur de la pièce qui se fond dans la peau de Jacques De Bascher avec autant de talent que de passion.
Ses réponses – qui m’ont beaucoup plu – sont autant d’éléments qui permettent de comprendre pourquoi cette pièce est tellement singulière… et excellente !
RENCONTRE AVEC GABRIEL MARC, AUTEUR ET INTERPRÈTE DE JACQUES DE BASCHER
Z.P : Comment vous est venue cette idée de vouloir incarner Jacques de Bascher alors que c’est une époque que – étant donné que vous êtes très jeune – vous n’avez pas pu connaître ?
G.M : J’ai commencé ma scolarité en études supérieures par deux écoles de mode (L’atelier Chardon Savard puis la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne), j’ai toujours été un amoureux du travail de Monsieur Saint-Laurent j’ai donc lu beaucoup de choses à son sujet.
À cette époque, peu de choses sont dites sur Jacques de Bascher, ou alors quelques articles le traitant de Gigolo ou du diable de Paris. Je ne comprenais pas pourquoi tant de haine à son sujet j’ai donc écrit quelques phrases, quelques idées mais vu le peu d’informations que j’avais je n’ai pas pu aller bien loin. Les films sur Yves Saint-Laurent sont sortis, puis des biographies sur Jacques et j’ai trouvé ce personnage encore plus fascinant.
J’ai surtout eu envie de lui donner la parole et d’avoir son point de vue.
Il est mort très jeune et le tout paris en a fait une cible d’un système ou d’une caste et je trouvais cela insupportable. J’ai donc créé une sorte de divagation personnelle autour de ce personnage.
Quant à l’époque j’ai toujours été fasciné par le 20eme siècle mais dans mes références ça allait principalement des années 20 aux années 60, je trouvais les 70’s et les 80’s un peu vulgaires, mais en m’intéressant à Jacques j’ai appris à aimer cette décennie et surtout le vent de nouveauté et de liberté qu’elle avait, cette époque a été un tournant pour le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. Après c’est un petit milieu que je décris, celui de la mode donc un milieu privilégié alors on est loin des crises de l’époque.
Z.P : Vous campez à merveille le dandy élégantissime… Êtes-vous, dans la « vraie vie» un fan de mode et de haute couture ou est-ce totalement un rôle de composition?
G.M : Il y a certainement beaucoup de points très similaires avec Jacques mais principalement sur son regard sur l’art et sur la mode. (Après de façon évidente comme c’est moi qui ai écrit, sur ces sujets, il y a beaucoup de moi).
Mais j’adore follement la mode, j’aime m’habiller, dénicher des pièces, faire des looks insensés et pour moi ça a toujours été un sujet sérieux, c’est social et sociétal la mode.
Même la personne qui a horreur de la mode aura besoin de s’habiller et donnera cette information par les vêtements qu’elle aura choisi. Au-delà du beau ou de la haute couture c’est vraiment cette chose-là qui m’intéresse, j’adore essayer de comprendre les gens par leur vêtement. Et puis c’est un milieu fascinant qu’on l’aime ou qu’on le déteste, ça fait toujours un peu rêver je crois, alors associer mode et théâtre c’est génial. J’en parlais il y a quelques temps avec quelqu’un, cette personne m’a dit « je travaille dans la mode et je vais peu au théâtre mais ce sujet m’intéressait » et j’imagine que ça sera pareil pour les gens qui vont au théâtre et qui ne s’intéressent pas à la mode, si j’ai pu faire un pont entre ces deux mondes, j’en suis ravi !
Z.P : Vous avez créé cette pièce avec ce souci de réalité, de vraisemblance, dans les moindres détails, qui la rend exceptionnelle, du coup, j’imagine que vous vous êtes plongé dans des archives de l’époque pour arriver à un tel résultat ?
G.M : J’ai ce regard là quand je vais au théâtre quand je vais voir un film, d’ailleurs à l’heure où je réponds il nous manque encore quelques petits détails qui m’agacent à chaque représentation mais cela restera entre nous ! Je crois qu’il y a peu de choses modernes dans ce spectacle, tout a été chiné pour accessoiriser le beau décor fait par Erwan Rio que je remercie chaque soir parce que c’est un plaisir de jouer dedans.
J’ai construit ce spectacle comme j’aurais voulu le voir, j’avais peur des anachronismes …
… parce que je les vois toujours en tant que spectateur, je déteste les téléphones qui ne sont pas branchés dans une pièce de théâtre par exemple et il est vrai que le fil n’est pas très esthétique mais étrangement ça m’aide de penser que le téléphone est un vrai ( Ah les comédiens … ). Et plein de choses nous ont inspirés avec Guila en travaillant, des photos, des interview liées ou pas avec le personnage d’ailleurs. Et pour les plus attentifs, il y a plein de petites choses disséminées dans le décor qui font réellement référence à Jacques ou à Monsieur Saint-Laurent ou à Karl Lagerfeld, et c’est un petit plaisir personnel quand des gens reconnaissent des petites choses comme cela.
Z.P : Est-ce un projet qui vous taraudait depuis longtemps ? Et si oui avez-vous eu l’opportunité de rencontrer Karl Lagerfeld de son vivant et d’évoquer ce projet avec lui?
G.M : Alors ce projet, oui, trotte depuis longtemps, comme je vous le disais j’ai commencé mes études en mode en 2012, je crois que l’idée a commencé à apparaître en 2015. J’ai essayé de contacter quelques personnes mais c’était très compliqué, et parler de Jacques avec Karl me terrifiait alors je n’ai pas osé et je le regrette un peu aujourd’hui.
Mais il y a une chose assez folle qui s’est produite en 2019 …
Je n’avais encore rien de construit sur ce spectacle. Beaucoup d’idées en vrac dans des carnets mais aucune continuité et je tombe sur un concours de seul en scène sur Facebook où il faut présenter 7 minutes et je n’y prête pas plus attention que cela donc je continue de scroller sur mon téléphone… puis je reviens dessus et je vois que la finale se déroulera au Palace, comment ne pas être convaincu au vu de mon sujet. Je passe différentes étapes et je suis sélectionné pour la finale.
Nous sommes le 18 février 2019 sur la scène du Palace et je fais revivre Jacques de Bascher !
[….] Le lendemain je vois plein de notifications sur mon portable, des news et des messages de personnes dont j’ai parlé de ce projet qui m’annoncent que Karl Lagerfeld est décédé dans la nuit. J’ai trouvé cela très étrange et je n’ai toujours pas trouvé la bonne explication à ce concours de circonstances sinistre.
Les réponses de Gabriel Marc corroborent ma première impression : Gabriel Marc n’est pas seulement un talentueux comédien qui se serait glissé dans la peau de son personnage. C’est un passionné ! Passionné de mode, d’art, et j’irais presque jusqu’à dire de sociologie.
« J’ai eu envie de construire ce qu’on ne sait pas de ce personnage […] il était aux premières loges de la création d’un grand nom et de l’ascension d’un génie. Mais lui dans tout cela ? Il était de toutes les soirées mondaines mais son intimité, son regard sur cette époque, nous a échappé. Tout a été dit sur le personnage, je voulais que l’homme se confie […]» Gabriel Marc
J’avoue que cet échange avec Gabriel Marc m’a beaucoup plu et m’a même donné envie de lui consacrer une rubrique « looks » c’est dire !
Quoiqu’il en soit, je ne saurais que trop vous inviter à aller applaudir cette excellente pièce au Théâtre de la Contrescarpe.
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