Le Théâtre Actuel La Bruyère accueille « Dolores », une pièce de Yann GUILLON et Stéphane LAPORTE, mise en scène par Virginie LEMOINE.
Sur scène, la distribution retrace le destin bouleversant de Sylvin Rubinstein, danseur flamboyant devenu résistant. Ce spectacle entre théâtre, danse flamenco, chant et musique en direct, donnent au récit une intensité rare.
Le cadre du récit est aussi simple qu’émouvant : à 87 ans, Sylvin revient à l’Adria, cabaret de ses débuts. Face à Josef, un serveur qui l’écoute avec une attention grandissante, il se décide enfin à raconter. La voix tremblante les souvenirs remontent ...
Un duo flamboyant au sommet de sa gloire
Dans les cabarets des années 1930, un frère et une sœur enflamment les scènes avec leur numéro de flamenco. Sylvin et Maria Rubinstein, devenus « Imperio et Dolores », connaissent un succès international. Leur grâce, leur complicité et leur énergie les propulsent au rang de couple vedette, adulé par le public. Mais cette ascension fulgurante s’interrompt brutalement avec la montée du nazisme, qui plonge l’Europe dans la terreur.
De la lumière à l’ombre : Le récit d’un destin brisé
À Varsovie, la guerre enferme les jumeaux dans le ghetto. La séparation, puis la disparition de Maria, laisse Sylvin face à un gouffre abyssal.
Hanté par la disparition de sa sœur bien-aimée, Sylvin Rubinstein refuse de se résigner. Danseur flamboyant devenu héros de l’ombre, il choisit la voie de la résistance. Déguisé parfois en femme, il devient Dolores, l’incarnation vivante de Maria, et engage une lutte sans merci contre l’oppresseur
Désormais, ce n’est plus seulement la sœur disparue qui danse, mais une identité qui se dresse face à la barbarie.
À travers son parcours hors du commun, c’est toute la douleur d’une génération, mais aussi la force de la mémoire et de la survie qui s’expriment.
« Certaines histoires sont plus incroyables que d’autres. Celle que Sylvin Rubinstein se décida de révéler à plus de 80 ans, après toute une vie de silence, est sidérante », confient Yann GUILLON et Stéphane LAPORTE, les auteurs. Découvrant son destin grâce à la série documentaire Les Oubliés de l’Histoire, ils ont choisi d’en faire une fresque théâtrale où la danse et le drame s’entrelacent. « Tous les éléments de la tragédie étaient présents. Nous n’avions plus qu’à les ordonner pour leur conférer une logique théâtrale et un liant chorégraphique », expliquent-ils.
Une mise en scène sensible et inventive
La mise en scène de Virginie LEMOINE donne toute sa puissance à cette épopée singulière. Sur scène, le dispositif scénique reste volontairement épuré : voilages, projections, table transformée selon les lieux. Cette sobriété laisse la place aux comédiens, danseurs et musiciens d’incarner la fulgurance des souvenirs. se déploient les voix, les corps et la musique.
La troupe réunit des interprètes de haut vol : Olivier SITRUK ou Adrien MELIN, (le trés émouvant Sylvin Rubinstein), François FEROLETO (Kurt Werner, un officier de la Wermacht fervent opposant au régime nazi), Joséphine THOBY (bouleversante et onnoncente Maria).
Les chorégraphies de Marjorie ASCIONE, portées par le flamenco vibrant de Rubén MOLINA (ou Carlos ESCUDERO) et Sharon SULTAN, incarnant Maria & Sylvin, viennent traverser le texte comme des éclats de mémoire vive, soutenant l'intensité dramatique. La chant de Cristo CORTES et la musique de Dani BARBA, jouée en direct, ajoute un supplément d'âme qui accompagne le voyage avec ferveur.
La pièce est un hommage vibrant à l’art comme résistance et à la mémoire des anonymes devenus héros malgré eux. Une œuvre de chair et de mémoire, une ode à la fraternité, au courage, à la mémoire. Une fresque où l’art se fait résistance, où la danse devient le cri de ceux qu’on a voulu faire taire. À travers cette œuvre bouleversante, le théâtre se fait dépositaire d’une histoire qui nous dépasse, mais qui continue de nous parler.