Rencontre avec Alexis Michalik, acteur, auteur et metteur en scène.
1. Quelle est la première pièce qui vous a marquée et pourquoi ?
La première pièce qui m’a marquée en tant que spectateur, c’est « Mnemonic » de Simon Mcburney à la MC93 de Bobigny. C’était une pièce sur la mémoire qui transcendait le cadre de la scène.
Le spectacle commençait par un long prologue sur la mémoire et sur notre rapport à celle-ci. Les spectateurs étaient invités à mettre un bandeau sur leurs yeux et convoquaient leurs propres souvenirs. Puis, on nous demandait d’enlever le bandeau et sur scène se trouvait l’acteur qui avait dit le prologue.
Nous apprenions en réalité, qu’il avait été substitué par un enregistrement. C’est alors que la pièce débutait vraiment et que nous fûmes transportés dans une histoire prodigieuse. Je me souviens m’être dit : « c’est la première fois que j’entrevois les possibilités au théâtre comme étant plus incroyables qu’au cinéma. ».
C’était aussi la première fois que je voyais l’interaction avec le public utilisée de manière si intelligente.
2. Pourriez-vous nous raconter les réactions les plus inattendues du public, observées pendant vos spectacles ?
Je pense au premier spectacle que j’ai mis en scène : une adaptation du « Mariage de Figaro ». Nous avions une vingtaine d’années, j’étais au conservatoire du 19ème arrondissement et nous étions très fiers de notre spectacle. Je me souviens, lors de cette toute première représentation, du premier rire à la première scène vraiment comique. Je m’étais dit en amont que cette scène serait drôle, pourtant, entendre ces rires m’a littéralement coupé les jambes. J’ai pensé : « Oh mon dieu, ça marche ».
Récemment, lors de la première d’Edmond au théâtre du Palais Royal, nous avons été surpris par les réactions du public qui se mettait spontanément à applaudir alors que la pièce n’était pas terminée. Les applaudissements ponctuaient les scènes en crescendo, si bien qu’à la fin du spectacle, quand « Cyrano » se jouait sur scène, nous n’arrivions plus à distinguer les applaudissements des acteurs de ceux du public.
3. Est-ce qu’il vous arrive d’être habité par les personnages que vous avez créés ?
Un petit peu… Dans le cas d’Edmond par exemple, j’ai commencé à penser aux personnages il y a 15 ans. Je me projetais alors dans le personnage de Léo, le jeune comédien ami d’Edmond.
Et finalement, quand nous avons monté ce spectacle quelques années plus tard j’avais de l’expérience en tant que comédien et je me retrouvais dans la peau d’un jeune auteur et metteur en scène. Je me suis alors identifié au personnage d’Edmond parce que ses préoccupations étaient les miennes au quotidien.
Je pense que d’une certaine façon, on s’identifie toujours à ses personnages. Dans Intra-muros par exemple, je me suis un temps posé la question de jouer le metteur en scène qui vient donner son cours de théâtre en prison. J’ai finalement préféré donner ce rôle à un meilleur acteur.
Au-delà d’être habité, j’ai surtout une certaine affection pour mes personnages.
4. Qu’est-ce que vous n’avez pas encore osé faire ou imaginer sur scène ?
Je n’avais pas encore monté de vraie comédie musicale. C’est le cas avec Les producteurs au Théâtre de Paris. Cependant, si j’ai une confiance totale dans le texte de Mel Brooks, cela fait longtemps que je n’ai pas monté un texte qui n’est pas le mien. J’espère donc que l’apport de la mise en scène fera honneur au texte.
Monter son propre texte est une liberté. Si un problème se pose dans le travail d’une scène, l’auteur présent peut la réécrire, la couper ou la rallonger.
Ne pas être auteur de son texte devient plus compliqué, il faut trouver d’autres solutions. C’est aussi pour cette raison que je me suis mis à écrire. Pour trouver cette liberté-là.
5. Quel est le moment que vous préférez dans la création d’un spectacle et à contrario, celui que vous aimez le moins ?
Le temps que je préfère dans la création d’un spectacle est celui des répétitions. Le moment où la création émerge.
J’aime quand nait du papier une scène qui prend vie à travers les acteurs. J’aime être dans une salle de répétition, à chercher. En général je sais assez vite ce que je veux donc ça se décide rapidement. C’est organique chez moi.
Mais si l’écriture est souvent la partie la plus fastidieuse, le moment que j’aime le moins c’est surtout quand un spectacle s’arrête !
Un grand merci à Alexis Michalik pour cet entretien. Rendez-vous au Théâtre de Paris à partir du 26 Novembre pour découvrir son prochain spectacle, la comédie musicale « Les Producteurs ».
https://tpa.fr/pieces-theatre-lyon/intra-muros-5383.html